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Rotincia - Accueil Accueil Rotincia > Ressources > Le Canton de Montdidier

Description
du Canton de
Montdidier
par M. l'abbé Godart

I. 1. i. Description physique

Étendue

Le canton de Montdidier appartient à l'arrondissement du même nom ; il est situé au Sud-Est du département de la Somme dont il fait partie. Il est borné à l'Ouest par le canton d'Ailly sur Noye ; au Nord, par ceux de Moreuil et de Rosières ; à l'Est, par celui de Roye. Au Sud, il est limité par les cantons de Ressons, de Maignelay et de Breteuil qui appartiennent au département de l'Oise. Son périmètre forme un polygone très irrégulier.

Parmi les cinq cantons dont est formé l'arrondissement, celui de Montdidier tient le premier rang par sa superficie qui est, d'après les évaluations cadastrales, de 20.456 hectares 03, se partageant ainsi :

Terres labourables 15.880 ha 21
Prés 834 ha 61
Bois et futaies 2.110 ha 46
Jardins 321 ha 12
Vergers 97 ha 75
Autres superficies cultivables 332 ha 57
Routes, maisons, etc.  
Superficies non cultivables 879 ha 31
Ravins, étangs, etc.  

Le service vicinal donne à peu de chose près la même superficie. Mr l'agent voyer en chef du département, dans son rapport du 1er juillet 1892, la fixe à 20.453 hectares.

Population

Par la population, le canton de Montdidier n'arrive qu'au quatrième rang : il ne renferme en effet d'après les chiffres du dernier recensement que 12.818 habitants, se répartissant comme il suit entre les trente trois communes qui le composent :

Andechy 365
Assainvillers 295
Ayencourt le M. 117
Becquigny 177
Bouillancourt 184
Boussicourt 127
Bus 226
Cantigny 141
Cardonnois (Le) 77
Courtemanche 127
Davenescourt 750
Erches 274
Etelfay 357
Faverolles 167
Fescamps 302
Fignières 189
Fontaines sous M. 219
 
Gratibus 183
Grivillers 130
Guerbigny 563
Hargicourt 323
Laboissière 268
Lignières les Roye 250
Malpart 101
Maresmontiers 139
Marquivillers 270
Mesnil St Georges 176
Montdidier 4.631
Onvillers 146
Piennes 349
Remaugies 188
Rollot 873
Rubescourt 113

Il y a soixante ans, la population du canton était de 13.169 habitants : nous venons de dire qu'elle n'est plus aujourd'hui que de 12.818 hab. A la même époque, Montdidier comptait 4.032 hab. ; aujourd'hui la population du chef lieu est de 4.631 âmes.

Nous n'avons pas à nous occuper des diverses causes de la diminution de la population : nous ferons seulement remarquer en passant que cette diminution s'est faite au détriment des campagnes. Cela tient surtout au courant fâcheux qui entraîne les populations rurales vers les villes. On ne veut plus des rudes travaux des champs : les jeunes gens, fiers de la teinture d'instruction qu'ils ont reçue aiment mieux la vie tranquille des bureaux : ils veulent être fonctionnaires. Le nombre de ceux-ci a augmenté dans ces derniers temps dans une proportion effrayante. Or la multiplicité des employés est un signe de décadence. On peut appliquer à notre époque ce que Lactance disait de l'empire romain dévoré sous Dioclétien par le grand nombre d'hommes salariés.

Nature du sol

Si l'on consulte la carte géologique du département de la Somme dressée par Mr de Meray, on voit que le plateau qui forme la plus grande partie du canton de Montdidier appartient aux terrains quaternaires : il est en effet recouvert de limon ou de lœss qui ont en certains endroits une épaisseur de sept à huit mètres, c'est une terre rougeâtre très fertile, appelée selon les pays, terre à betteraves ou terre à briques.

Au dessous de ce lœss se trouve d'immenses et épaisses couches de craie qui appartiennent aux terrains secondaires. Ce calcaire ou carbonate de chaux est moins blanc à la base de la formation que vers le sommet où se trouve la craie proprement dite. On y trouve souvent des lits de silex peu épais et parallèles à la stratification des couches. On rencontre également dans la craie de Montdidier quelques fossiles, entre autres le micraster coranguinum, des anachytes et des bélemmites : ces derniers sont vulgairement appelés pierres de bonheur.

La craie en certains endroits est noduleuse ou magnésienne : elle affleure sur le flanc des vallées, aussi bien de la rivière de l'Avre ou de celle du Dom que sur les flancs des vallées sèches.

Vers le bas des pentes sont des dépôts meubles provenant de l'érosion même des couches qui formaient les flancs des vallées. Au fond enfin, se trouvent des terrains d'alluvions et des tourbes ; celles ci ont une épaisseur variable ; quelquefois elle atteint huit mètres. Il y a des tourbières dans la vallée des Doms, à partir de Bouillancourt, dans la vallée de l'Avre on extrait d'excellentes tourbes à Becquigny et à Davenescourt (pour ne parler que du canton de Montdidier). Quand la tourbe est de qualité inférieure, on la réduit en cendres dans le marais même : ces cendres sont ensuite jetées comme engrais sur les prairies artificielles.

Des dépôts meubles de la même nature que ceux dont nous avons parlé entourent la hauteur qui se trouve derrière Remaugies. Le village d'Onvillers est entièrement bâti sur ces dépôts qui, contournant la légère butte sur laquelle est la Villette (Rollot), s'étendent depuis le bas de Régibaye jusqu'aux premières maisons du Lundi à Piennes.

 

La hauteur sur laquelle se trouve Rollot diffère absolument des terrains qui l'environnent ; cette éminence mesure 4 kil. du S.O. au N.E. et 2 kilomètres du S.E. au N.O.. L'extraction des lignites a permis d'étudier la composition de ces terrains. Ils sont composés d'argile plastiques, de sables calcaires et de lignites, et appartiennent à l'époque tertiaire. La base de l'argile plastique offre des lentilles calcaires, formant jusque sur le territoire de Rollot, au lieudit le Bois des Sapins, mais notamment à Mortemer (Oise, à 2 kil. de Rollot) un calcaire lacustre gris, le débitant en dalles à la face inférieure desquelles adhèrent des valves d'Ostrea bellovacina. Au dessus vient l'assise des lignites qui se termine habituellement par un cordon coquiller. Puis des sables jaunes, d'origine marine, dans lesquels on trouve entre autres fossiles le Cerithium variabile, la Melania inquinita, la Cyrena cruceiformis et l'Ostrez bellovacina : tout semble indiquer que cette hauteur appartient au tertiaire eocène.

À Regibaye, on rencontre des galets de silex de différentes grosseurs, dont la croûte présente sur les cassures des bandes ferrugineuses ou des plaques verdâtres avec empreintes de végétaux.
Notons encore que le sol occupé par le bois qui s'étend entre Bus et Fescamps est formé d'un sable blanchâtre recouvert en plusieurs endroits par une couche d'argile plastique grisâtre.

Nous avons dit déjà que la plus grande partie de la superficie du canton appartient au plateau qui s'étend entre les deux rivières de l'Avre et des Doms. Sur la rive gauche de cette dernière, le sol présente des ondulations un peu plus prononcées. A l'extrémité Sud du canton se trouvent des hauteurs qui appartiennent à la ligne de partage des eaux entre les bassins de la Somme et celui de la Seine. On ne rencontre pas néanmoins de bien grandes différences d'altitude. Les points les plus élevés du canton sont à l'Ouest, à la ferme de Belle-Assise (dépendance de Fontaines) où l'on côte 125 m, et au Sud, sur la limite du département, au bois de Remaugies, où l'on côte 112 m d'altitude. Le point le moins élevé est à l'aval de Boussicourt avec 56 m d'altitude.

Rivières

Nous avons nommé les deux rivières qui arrosent le canton de Montdidier, l'Avre (50 kil.) au Nord, et les Doms (21 kil.) à l'Ouest.

L'Avre prenait sa source à Avricourt (Oise) dans l'antique forêt de Bouvresse, au canton de Lassigny. Ses sources primitives sont aujourd'hui taries probablement à cause du déboisement. Cette rivière qui coule du S.E. et N.O., commence maintenant vers Roiglise, passe à Roye où elle se grossit des eaux de la petite rivière de St Firmin, pénètre dans le canton de Montdidier vers le territoire de l'Echelle St Aurin, traverse les prairies de Guerbigny, Warsy, Becquigny, arrive à Davenescourt, où la vallée s'élargit et où l'on extrait de la tourbe d'une excellente qualité, arrose l'extrémité de Boussicourt, et après avoir fait un coude à Contoire, arrose Pierrepont-Hamel où elle reçoit les Trois Doms : elle devient navigable à Moreuil, reçoit la Luce à Hailles, la Noye à Fouencamps et se jette dans la Somme au dessus de la Neuville après un parcours de 50 kilomètres environ.

Cette rivière porte dans les anciens actes différents noms. Ainsi dans un titre concernant une propriété du Chapitre d'Amiens de 1669, elle est nommée Avre. On trouve dans le dictionnaire topographique de Mr Garnier les autres dénominations ; on peut y suivre à travers les altérations de l'apellation primitive la filiation du nom actuel. Ainsi Aurina, Avrégne, Avreignes, d'où Avre. Dans le registre de l'échevinage d'Amiens (1602), elle est désignée sous le nom de rivière d'Orin ou d'Aurain.

Dom Grenier rapporte un titre de 1249 où la rivière dont il s'agit est simplement désignée par ces mots : l'ieue qui va de Moreuil à Hailles (Introduction à l'Histoire Générale de la Picardie).

Enfin, en 1646, dans la Description des rivières de France, Avrillon l'appelle le Moreuil. Et en 1680, Colbert dans une lettre relative à un projet de canalisation, la nomme la rivière de Moreuil.

L'autre rivière appelée indifféremment : le Dom, les Doms ou les Trois Doms, coule dans la direction du Sud au Nord Ouest, fertilisant aux environs de Montdidier de nombreux jardinages. Il se formait jadis de la réunion de minces filets d'eau, prenant naissance en trois villages de l'Oise, à Domfront, à Dompierre et à Doméliers, d'où son nom de rivière des Trois Doms. Les sources de Dompierre et de Domfront sont taries depuis un certain nombre d'années : nous ne les citons donc que pour mémoire.

A Domélien, la rivière naissante reçoit les eaux assez abondantes de la fontaine Marleuse, située sur le territoire de Rubescourt. La rivière ainsi grossie arrive aux prairies d'Ayencourt où ses eaux faisaient tourner, il y a peine trente ans, un premier moulin, passe au Monchel où se trouvait près de la route un deuxième moulin, arrive à Montdidier au moulin de la porte de Paris, au dessous duquel elle reçoit les eaux de la fontaine des Blancs Murets et se divise un peu plus loin en deux bras qui se rejoignent au pont de l'Ave Maria, jadis pont d'Amour. Après avoir traversé les faubourgs et servi à diverses industries, la rivière reçoit encore les eaux de quelques sources, serpentent paresseusement à travers les hortillonnages des maraîchers, traverse les prairies de Courtemanche, Fontaines, Maresmontiers, Gratibus et Bouillancourt. C'est à partir de ce dernier village qu'on rencontre quelques tourbières. La tourbe qu'on extrait n'est pas de bonne qualité. Enfin, la rivière poursuivant son cours arrive après quelques kilomètres à Pierrepont, où elle se joint à l'Avre.

Là elle perd son nom  : elle le conservait autrefois jusqu'à Amiens où un quai dit du Dom et une petite place de même appellation en rappellent encore le souvenir.

Sa longueur totale est de 21 kilomètres. Ses eaux alimentent cinq usines.

Le nom que porte la rivière est moderne. Les anciens registres de Montdidier nomment ce cours d'eau tantôt la rivière de Becquerel, du nom du faubourg qu'elle traverse, tantôt la rivière du Couppy ou de Couppin.

Au commencement du XVIIe siècle, on songea à la canalisation des Doms, et c'est à Henri IV que revient l'honneur de ce projet. Il est bon de noter en passant que, dès le XIIe siècle, un des seigneurs de Moreuil, Bernard IIIe du nom, avait rendu l'Avre navigable depuis Pierrepont jusqu'à la Somme. Il s'agissait donc de prolonger cette voie de navigation jusqu'à Montdidier.

Nicolas de Lan, trésorier de France en la généralité de Picardie, reçut ordre, en 1603, de rechercher s'il serait possible d'augmenter le débit des sources de Doms et de rendre la rivière navigable depuis Montdidier jusqu'à Pierrepont. Il vint à Montdidier, étudia la question et donna un avis favorable. Malheureusement il ne trouva pas dans les magistrats de la cité l'appui qu'il aurait du obtenir. Ce projet fut donc abandonné. On était en 1605.

Le projet fut repris sous Louis XIV. Colbert, un des plus grands ministres que la France ait eus, songeait à relier par un canal la Somme à l'Oise. Du Buisson, ingénieur du roi, fut envoyé à Montdidier pour l'étude de cette question. Chose lamentable, loin de le seconder, on entrava ses recherches, on se montra presque hostile et l'on fit ainsi avorter le projet le plus utile pour nos contrées. Quels services immenses en effet n'eut pas rendus cette voie nouvelle, ouverte au commerce et facilitant les communications entre deux riches provinces ?

En 1872, un autre projet fut présenté au Conseil Général. Il n'était plus question des Doms : il s'agissait de canaliser l'Avre jusqu'à sa source à Avricourt et d'opérer depuis ce dernier point une jonction avec la rivière de l'Oise à Pont l'Evêque près de Noyon. On aurait ainsi créé une grande voie de communication dans le Nord. Partant de St Valéry sur Somme, elle aurait traversé Abbeville, Amiens, Moreuil, Davenescourt, Roye et Noyon, suivi l'Oise jusqu'à la Seine et aurait relié directement la Picardie avec Paris. Un avis favorable fut donné par le Conseil Général de la Somme : mais une fois encore le projet en resta là. Il est donc à désirer qu'un nouvelle initiative attire sur ce projet l'attention des conseils généraux des département intéressés et du Parlement.

Voies de communication

Il reste peu de vestiges dans le canton des anciennes voies romaines. Une branche de la voie militaire de Beauvais à Bavai coupe le territoire de Rollot, à l'extrémité sud du village : c'est aujourd'hui un chemin de moyenne communication qu'on désigne le plus souvent sous le nom de chaussée Brunehaut. On a découvert, il y a quelques années, sur le bord de cette route, à Rollot, un cimetière gallo-romain : dans les tombes ouvertes, on a trouvé de nombreuses poteries rouges et noires et quelques objets en bronze, fibules et agrafes.

Une branche de la voie d'Amiens à Compiègne, passait par Moreuil et montait à Montdidier si l'on en croit les manuscrits de Scellier, bourgeois de cette ville. On y découvrit, dit-il, une très belle chaussée de pavé, le long du fossé depuis la porte d'Amiens jusqu'à la tour de Jouvency, qui tendait vers le fond de la vallée de St Martin.

Il serait plus exact de supposer que cette voie passait dans le faubourg St Martin au S.O. de la ville. Quoiqu'il en soit, on ne la reconnaît bien qu'à Pas, Passus St Martini (dépendance de Rubescourt), de là elle passe entre Frétoy (Oise) Fracta via, et le Tronquoy (Trunca via), coupe au village de Courcelles la voie citée plus haut de Beauvais à Bavai. Elle est nommée Strata Compendii dans un titre de l'année 1200 (Cart. d'Ourscamp) et la carte générale de France de Cassini la range parmi les chaussées Brunehaut.

Il faut se rappeler qu'au moyen âge la circulation sur les routes n'étaient pas absolument libre. Il y avait en certains lieux ce qu'on appelait le droit de travers. C'était une sorte de redevance qu'on prélevait non seulement sur la personnes et les marchandises, mais aussi sur ce qui servait à les transporter. Ce droit se percevait au profit de l'échevinage à Cantigny, à Fontaines sous Montdidier et à Mesvillers (Piennes). Ce droit fut aboli par arrêt du Conseil en date du 10 novembre 1739.

Aujourd'hui le canton est coupé par plusieurs belles voies de communication. La route départementale n°35 d'Amiens à Compiègne par Montdidier le traverse du N.O. au S.E. depuis le territoire de Gratibus jusqu'à l'extrémité de celui de Rollot ; et celle n° 3 de Rouen à la Capelle le parcourt de l'Ouest à l'Est depuis la ferme de Belle-Assise jusqu'au delà de Grivillers. Nous ne parlerons pas des autres chemins de grande ou moyenne communication, reliant les communes entre elles : on doit rendre justice au service de la vicinalité et reconnaître que grâce aux efforts persévérants de cette administration, le département de la Somme est par le réseau de ses routes et leur parfait entretien, un des plus favorisés sous le rapport des voies de communication.

 

Montdidier devait, dès l'établissement des premières voies ferrées, voir passer au pied de sa montagne la ligne de chemin de fer de Paris à Lille, c'est à dire la grand ligne du Nord. De fâcheuses influences privèrent le chef-lieu d'arrondissement de cet avantage, et Montdidier resta déshérité jusqu'en 1872. Mais aujourd'hui, le canton, traversé par plusieurs lignes, est parfaitement desservi.

Le premier chemin construit fut la ligne de Picardie et Flandres, à une seule voie, allant de St Just à Cambrai. Il dessert, dans le canton, Montdidier, Faverolles (halte), Laboissière et Grivillers.

Ensuite vint le chemin de fer de Dijon à Amiens, à deux voies, desservant Montdidier, Gratibus, Maresmontiers, Bouillancourt, Hargicourt.

Le chemin de fer d'intérêt local est de date plus récente : il est à voie étroite et relie Montdidier à Albert ; il dessert Montdidier, Fignières, Becquigny et Davenescourt. On ne le connaît dans le pays que sous le nom pittoresque du Tortillard. Le dernier maître de poste à Montdidier fut Mr Cavé, propriétaire de l'hôtel du Grand Monarque, aujourd'hui disparu.

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