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Rotincia - Accueil Accueil Rotincia > Ressources > Le Canton de Montdidier

Description
du Canton de
Montdidier
par M. l'abbé Godart

Notes historiques et archéologiques sur les communes du canton > Le-Cardonnois

Petit village de 77 habitants, situé à l'extrêmité Ouest du Canton, à une altitude de 125 m, dont les pentes incultes sont couvertes de chardons : d'où le nom. Il est à 7 kil. de Montdidier.

Il s'appela d'abord Cardinetum (1159), locus a Carduis appellatus (Du Cange), puis Cardonetum, Cardonatum (1211), Cardonnoi (1258) et enfin Cardonnoy et Le Cardonnois : c'est la dénomination actuelle.

Le village ressortissait au bailliage et à la prévôté de Montdidier.

Ce pays semble avoir une origine ancienne : en défrichant les bois du Cardonnois (1846-1859) on a trouvé de nombreux vestiges de la domination romaine, tels que tuiles, fragments de poterie, ferrements et des monnaies d'Auguste, d'Agrippa, de Nerva et de Trajan.

 

Les premiers seigneurs de ce pays en ont porté le nom. En 1183, Arnould du Cardonnoy paraît comme témoin dans un accord entre la commune de Puçeuses (près de Ravenel) et l'église de Beauvais.

En 1185, parmi les chevaliers appelés à la chatellenie de Montdidier pour rendre hommage à Philippe Auguste se trouve Jean du Cardonnoy. Johannes de Cardinato homo ligus et dimidius par tenet Cardinatum cum ejiis pertineneis et boscum et terram et homagia.

Ce seigneur, qu'on trouve désigné sous le nom de Jean La Rage, se fit remarquer par ses libéralités envers les églises. Ainsi en 1188, il donna à l'abbaye de Froidmont 2 muids de blé, mesure de Montdidier, à prendre sur la terre du Cardonnoy. Rogue de la Tournelle confirma, l'année suivante, cette donation.

En 1198, ce même Jean du Cardonnoy paraît comme témoin et garant dans une charte de donation de Thibault, Evêque d'Amiens, en faveur du Prieuré de N.D. de Montdidier. Enfin, en 1216, il donna aux religieux de l'abbaye de Froidmont 20 sols de cens à prendre sur une maison qu'il avait à Montdidier, et, avant de mourir, fait un nouveau don de 20 sols encore à prendre sur les propriétés qu'il avait dans la même ville.

Adam son fils confirma cette donation en 1221. On a de lui une lettre (datée de 1266) de laquelle il appert que ledit Adam, Chevalier, Seigneur du Cardonnoy, vendit à Raoul de Raineval deux pièces de terre, attenant à la maladrerie de Pierrepont, à la condition de les tenir en fief du Seigneur du Cardonnoy, moyennant un cens de 6 deniers par an. En 1276, Adam IIe du nom, du Cardonnoy, parut à la semonce de Tours convoquée par Philippe Le Hardi.

 

En 1358, au moment des troubles de la Jacquerie, beaucoup de manoirs féodaux des environs de Montdidier disparurent : celui du Cardonnois fut du nombre. Il ne reste que la base d'une des vieilles tours du château, à quelques mètres de l'entrée de l'église. Les dépendances ont été converties en bâtiments de ferme ; au milieu de la cour s'élève le vieux pigeonnier ; c'est une tour en bon état de conservation.

En 1372, l'illustre famille de Raineval entra en possession de la terre du Cardonnois. On trouve en 1412, Jean de Raineval, seigneur de Méraucourt et du Cardonnoy : il mourut glorieusement à Azincourt en 1415. Agnès de Heilly, hérita, à cause de sa mère qui était de Raineval, de la terre du Cardonnois (Doc. Inéd. V. de B.). Cette terre valait alors cent vingt écus d'or. Agnès mourut en 1455 laissant en héritage le domaine du Cardonnoy à Jean d'Ailly, plus tard vidame d'Amiens. Ce seigneur, ami des plaisirs, prodigue, plein de sa volonté et de ses caprices, incapable de surveiller ses intérêts, fit de folles dépenses et fut obligé, pour payer une partie de ses dettes, d'aliéner une grande partie de ses terres. Celle du Cardonnoy fut du nombre et fut d'abord vendue à Laurent Herbelot. En 1480, elle fut acquise par Robert de Pymont et son fils, moyennant la somme de 8.000 livres. Ce Robert de Pymont était le receveur de Laurent Herbelot, premier acquéreur du domaine. Dans un procès dont on peut lire les détails dans les Documents Inédits publiés par Mr V. de Beauvillé, on le représente comme "un bien subtil homme, entendu à ses besognes".

Toujours est-il que dans ce procès qui lui fut intenté par Charles d'Ailly, Robert et son fils se qualifient modestement "détenteurs de la terre et seigneurie du Cardonnoy et d'un fief à Esclainvillers". En 1502, Robert de Pymont se montre plus hardi ; il se qualifie de seigneur du Cardonnoy et comparait en cette qualité dans une enquête ouverte par les maïeur et échevins de la ville de Montdidier, afin d'aviser aux moyens de se débarrasser de la créance du seigneur de Chepoix (Voir Hist. de Montdidier).

Vient ensuite Raoul de Pymont, fils de Robert : il avait épousé Marie de Bailleul.

Le procès intenté depuis des années prit fin en 1505 et perdu par les de Pymont qui durent restituer le domaine à Charles d'Ailly, vidame d'Amiens.

Peu de temps après la terre fut vendue à Raoul de Bernetz, qui s'intitula seigneur du Cardonnois. Il possédait dès 1541 un fief situé dans la banlieue de Montidider et appelé le fief Binet.

François de Bernetz, fils du précèdent, comparut, en 1567, à la rédaction des coutumes du gouvernement de Péronne, Roye et Montdidier, en qualité de seigneur du Cardonnoy. Il avait embrassé les idées nouvelles et c'est lui, qui, trois ans auparavant avait cité à comparaître devant le prince de Condé le lieutenant général de Bertin, qu'il accusait de mettre des entraves à l'exècution de l'édit de pacification.

En 1586, son fils Ezéchiel de Bernetz, qui appartenait lui aussi à la religion réformée et qui avait songé à une résistance armée, dut renvoyer aux armuriers d'Amiens les arquebuses et fourniments qu'il n'avait pu payer.

 

Nous ne savons pas entre quelles mains le domaine passa au commencement du XVIIe siècle mais on a conservé le souvenir d'un fait d'armes glorieux, dont le Cardonnoy fut à cette époque le théâtre. "En 1636, dans la fameuse année dite de Corbie, les troupes espagnoles serraient la ville de Montdidier : il y avait de fréquentes affaires d'avant postes. Une troupe de volontaires montdidiériens, très bien équipés, apprennent que 1.200 espagnols occupent Plainville, Broye, le Cardonnois et que le bois de Longue-Haye, situé sur le territoire de cette commune, leur servait de refuge. Infanterie et cavalerie, formant un corps de 300 hommes, marchent à l'ennemi qu'elles rejoignent près du bois. La mêlée fut rude. Les troupes chargèrent avec fureur. Les Espagnols se défendirent avec opiniâtreté : il fallut les déloger successivement des positions qu'ils occupaient [Dans la partie du bois défriché il y a quarante ans, on voit encore des retranchements en terre assez biens conservés. Suivant la tradition, ils furent exécutés par les Espagnols qui s'y étaient retirés.]. Les habitants des villages voisins opérant une heureuse diversion vinrent prendre l'ennemi à dos et l'attaquèrent à propos au passage du bois. Deux cents Espagnols restèrent sur place. La cavalerie fit beaucoup de prisonniers et s'empara de "tous les bagages" (V. de B.).

 

Le nom de Coupe-Gorge donné au ravin qui se trouve à l'extrêmité du territoire du Cardonnois et qui traverse la route de Rouen à la Capelle, est un souvenir du combat livré en ce lieu.

 

En 1640, le domaine était possédé par le Comte de Saveuse, qui, en 1680, le vendit à Jacques Vaquette. Celui-ci le laissa à son fils Jean Vaquette, conseiller au présidial d'Amiens. Après lui, vient Claude Louis Vaquette, Conseiller du roi au grand Conseil, seigneur du Cardonnois. Celui-ci vendit à son tour la terre à Jean Sabot de Luzan (d'azur au chef au pélican d'argent avec sa partie de gueules sur un champ de sable : Man. Scellier) qui avait épousé Françoise de Laudran. Après la mort de son mari, sa veuve (comtesse de la Marck) vendit la terre du Cardonnoy à Joseph Pellerin (1761) (Pellerin portait : d'azur à la fasce d'or, accompagné de trois coquilles de même en chef). Comme la terre du Cardonnoy relevait de la Salle du Roi de Montdidier et que le duc d'Aumont était devenu propriétaire incommutable de tous les droits de celle ci par échange avec le Roi, Joseph Pellerin eut à lui payer comme droits seigneuriaux la somme de 9.900 livres. Ce Pellerin était un véritable numismate et amateur de curiosités : son portrait très curieux a été gravé. l'encadrement est chargé de sphinx, de monnaies, etc. A sa mort, la terre du Cardonnoy changea encore de possesseur et entra dans la famille de St Fussien. Anne Louise Angélique de St Fussien de Vignereul, épouse de Alexandre Claude Victor Dufor, Comte de Mens, Colonnel de Cavalerie et Chevalier, demeurant à La Taule (Oise) devint par ses libéralités la bienfaitrice du Cardonnoy. Elle mourut le 15 juillet 1824. Par son testament en date du 26 juin de la même année, elle laissait 600# de rente aux pauvres de la commune, et 1.000# de rente à la fabrique, à la charge de faire dire 250 messes annuellement. Mr Antoine de St Fussien, demeurant à Forestel, hérita des terres du Cardonnoy. Celui ci ne pouvant laisser son bien à ses petites filles, qui étaient de naissance illégitime, vendit le domaine du Forestel et celui du Cardonnois à Mr de Beauvillé Victor, lequel, en mourant, fit la ville d'Amiens héritière de tous ses biens.

Nous devons citer encore le fief de Fouquelin ; il était situé au lieu dit la fosse Englart. François, mari et bail d'Antoinette Fouquelin, fille et héritière de Baude Fouquelin, en donna le relief en 1531.

L'église sous le vocable de St Gilles, n'offre extérieurement rien de remarquable. A l'intérieur, le chœur est percé de fenêtres ogivales. Les colonnettes qui supportent les nervures de la voûte ont des chapiteaux ornés de feuillage et de fruits et semblent datés de la fin du XIIIe siècle ou du commencement du XIVe siècle. Le chœur, auquel la nef a été ajoutée postérieurement, a pu être d'abord la chapelle castrale.

La paroisse a toujours appartenu au doyenné de Montdidier. Le collateur de plein droit était l'Evêque d'Amiens. D'après la déclaration faite par Me Martin Morel en 1728, les revenus étaient au total de 207 liv. 10 s. dont 4 barriques de vin estimées 80 liv. Le P. Daire assure que le vignoble du Cardonnois produisait un vin blanc assez estimé.

En 1789, d'après Darsy (Le Clergé d'Amiens), il y avait augmentation de revenus : ils s'élevaient à 700 livres.

 

Les registres de catholicité commencent en 1693. Nous y avons trouvé les noms des curés qui suivent :

1693          Florent Desjardins

1698          Jean Baptiste Lenormand. Il était natif de Montdidier. Il était prieur de St Martin de Combradel, au diocèse de Rodez et maître ès arts, gradué de l'université de Paris, lorsqu'il fut pourvu de la cure du Cardonnois par Me Alexandre Le Scellier, abbé de Foresmontiers, chanoine et doyen de la cathédrale d'Amiens et Vicaire Général de Mgr Feydeau de Brou.

La cure bientôt vacante (1699) fut desservie par Me Crescent, curé de Welles.

1709          Jean Baptiste Bourdon

1710          Pierre Vincent. Il déclare que la fabrique n'a que 60 sols de revenu.

de 1713 à 1731, lacune.

1731          .. Morel

1747          Pierre Beauvais

1763          Jean François Bertren

1787          .. Delacourt. C'est lui qui en 1792 remet les registres à la nouvelle municipalité. Nous ne trouvons après le rétablissement que quelques noms de curés : ainsi en 1820 . Le Couëdic. Il ne fit que passer. La paroisse est desservie par les curés voisins jusqu'en 1834, où nous rencontrons le nom de Coydy.

1842          Famechon

1847          Boucher

1850          Gautier.

Puis le service religieux est fait pendant un certain temps par les curés de Fontaine. Aujourd'hui ce sont ceux de Broyes (Oise) qui desservent Le Cardonnoy.

 

Lieux dits : Le fond de la Longue Haie - la Fond de Justice - les Camps St Gilles - le Jardin Gédéon - la Garenne.

 

C'est la commune la plus petite du canton qui nous donne la plus longue liste de maires. Est ce à dire que l'ambition des administrés donne assez de tracas aux magistrats municipaux pour que ceux-ci se fatiguent bientôt des honneurs et rendent leur écharpe avant que leur mandat soit expiré ? That is the question. Quoiqu'il en soit, voici leurs noms :

1793         Pierre Jacques Quiévrain, officier public, puis

an VIII             id, agent municipal et maire.

an X          Jean Lesage

1808         Théodore Robillard

1813         Pierre Alexandre Pillon

1826         Antoine François de St Fussien

1840         Jean François Petit

1848         Théodore Robillard (fils)

1855         Auguste Elie Delaporte

1868         Jacques Lecomte

1869         Pierre Jean Baptiste Caudrillier

1870         Jacques Lecomte 2°

1874         Émile Caron

1883         Adonis Robillard

1884         Etienne Morel

1886         Henri Robillard

1888         Etienne Morel 2°

 

Nous devons à l'obligeance de Mr le Curé de Coullemelle l'inscription de la cloche que renferme le clocher ; la voici : L'an 1719, j'ai été bénie par Me Charles Edouard Gueudé, bachelier es loix desserv. de ce lieu et nommée Chantal par Me Jean Franç. Guy Fillon de la Tour, avocat au Parlement, Conseiller en l'élection de Montdidier, seigr du Petit Mailly et par damle Jeanne Espérance Pillon de la Tour, sa sœur, et Me Pierre Louis Marguillier en charge. Certains prétendent que cette cloche provient de l'église de Fontaines. Nous ne voyons pas sur quel fondement repose ce bruit.

 

Disons encore que l'église possédait avant la Révolution un reliquaire qui lui avait été donné par Agnès de Heilly. Nous citons textuellement ce qu'en dit Scellier : "Les reliques qui sont dans cette église ne sont pas de St Maur, mais bien de St Loup, enfermées dans un croissant d'argent du poids de trois livres. Elles sont très anciennes. Elles ont été rencalées, comme il est dit dans les vieux titres, dans cette argenterie en 1400. La même chose est gravée dans ladite boîte d'argent en vieux gothique. Ce fut une dame de Raineval, dame en même temps du Cardonnoy, qui fit cette dépense. Mr le Comte de Saveuse, seigneur audit lieu, a fait mettre un pied à cette boîte en 1640. On a toujours compté que cette relique était un doigt de St Loup ou de St Leu en langage du pays.". Ce reliquaire a disparu dans la tourmente révolutionnaire.

Jean Vaquette, dont nous avons parlé plus haut, seigneur du Cardonnoy, né à Amiens en 1658, réunit l'amour des lettres à la science du droit. Il fut conseiller au présidial d'Amiens, maire et lieutenant général de police. Quand en 1700 il se fonda une société de gens de lettres dans cette ville, sa maison servit de lieu de réunion. En 1720, cette société cessa d'exister : trente ans après elle fut remplacée l'Académie des Sciences, belles lettres et arts du département de la Somme. M. Jean Vaquette s'exerça dans la poésie légère ; on a de lui : l'exilé de Versailles, les Religieuses qui veulent confesser, le singe libéral, etc. Il mourut en 1739.

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